La secrétaire générale du ministère français des Affaires étrangères, Anne-Marie Descôtes, est arrivée jeudi à Alger à la tête d’une importante délégation diplomatique afin de mener des discussions avec son homologue algérien, Lounès Magramane. Il s’agit de la première visite d’un responsable français de ce niveau depuis la suspension des échanges officiels en avril dernier, ce qui lui confère une portée politique particulière.

Le Quai d’Orsay a expliqué que Paris avait dépêché sa deuxième plus haute responsable dans le cadre d’une « visite de travail destinée à examiner les voies de reprise de la coopération ». Le ministère n’a pas fourni de précisions sur le contenu des entretiens, se limitant à indiquer qu’ils porteront sur la relance de la coopération dans les domaines migratoire, sécuritaire et économique.

Dans le même contexte, le journal Le Monde a rapporté que l’objectif principal de cette mission est de « redonner un nouvel élan aux relations bilatérales », notamment en ce qui concerne le fonctionnement consulaire et la réaccréditation de certains agents dont les dossiers restent en suspens. Les deux parties devraient également établir un calendrier pour le traitement des dossiers en attente, comme le retour des ambassadeurs, la visite programmée du ministre français de l’Intérieur Laurent Nunez et la situation des Algériens faisant l’objet d’obligations de quitter le territoire français.

La visite intervient au moment où un geste d’apaisement a été enregistré avec la grâce présidentielle accordée à l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal. Paris avait tenté de faire de son incarcération un levier de pression dans la crise avec Alger, sous l’influence de l’extrême droite. Bien que sa libération soit perçue comme un signe d’accalmie, la diplomatie algérienne insiste sur le fait que les relations entre les deux pays « dépassent la question d’une seule personne », selon les déclarations du ministre des Affaires étrangères Ahmed Attaf.

Lors de sa dernière conférence de presse, Attaf a d’ailleurs affirmé que la visite de la responsable française n’a aucun lien avec la grâce accordée à Sansal, ni dans le calendrier ni dans le contenu ni même au niveau symbolique.

Malgré quelques signaux positifs observés ces dernières semaines et qui laissent entrevoir une reprise progressive du dialogue entre l’Élysée et El-Mouradia, de nombreuses zones d’ombre continuent de planer sur plusieurs dossiers sensibles. Parmi eux, l’affaire du diplomate algérien arrêté en France l’an dernier à la suite d’une plainte déposée par Amir Boukhris, l’échange de retraits d’ambassadeurs, l’expulsion de diplomates ainsi que la suspension de la coopération judiciaire.

La visite d’Anne-Marie Descôtes traduit également un intérêt croissant de Paris pour une normalisation de ses relations avec Alger. Elle s’inscrit dans un changement notable de la stratégie de communication politique depuis le départ de l’ancien ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, une approche désormais plus discrète et moins médiatisée. Cette orientation s’est illustrée par la réception du président Emmanuel Macron accordée à l’écrivain Sansal à l’Élysée sans aucune couverture médiatique, un fait inhabituel dans la scène politique française où la presse est généralement associée à toutes les activités officielles.