Au cours des derniers jours, une série de critiques inédites émanant de députés réputés proches du président tunisien Kaïs Saïed a attiré l’attention, révélant l’ampleur des tensions internes au sein du système de gouvernance, dans un contexte marqué par la montée des protestations sociales dans le pays.

Plusieurs membres de l’Assemblée des représentants du peuple, autrefois considérés comme des alliés du chef de l’État, ont publiquement dénoncé les performances du gouvernement et des institutions. Une démarche qui a surpris l’opinion publique, d’autant que le Parlement demeure largement paralysé depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle Constitution. Ces prises de position interviennent dans un climat politique marqué par des arrestations visant des opposants, des procès controversés et une concentration accrue des pouvoirs entre les mains du président.

Parmi les réactions les plus marquantes figure l’annonce de la démission du député Mohamed Amine Wergui, qui a justifié son départ par « les violations répétées du règlement intérieur » et « l’ignorance des décisions du bureau du Parlement ». D’autres élus ont exprimé leur frustration face au manque de communication gouvernementale, à l’absence de transparence et à l’incapacité de plusieurs ministres à répondre aux questions des députés lors des débats budgétaires.

Dans ce contexte, la députée Majda Ouergui a dénoncé l’absence de la cheffe du gouvernement lors des séances de questions, estimant que cela traduit « l’incapacité de l’exécutif à répondre aux attentes des Tunisiens ». Elle a également critiqué ce qu’elle qualifie de « silence gouvernemental » et de manque d’informations fiables concernant des dossiers sensibles, notamment les affaires de corruption qui, selon elle, ne sont pas traitées avec le sérieux nécessaire, malgré les déclarations répétées du président à ce sujet.

Les critiques les plus virulentes ont été formulées par le député Ahmed Essaidani, du bloc « Voix de la République ». Il a affirmé que « l’État en Tunisie a perdu sa voie » et que « le système a perdu sa boussole », accusant le président d’être « déconnecté de la réalité » et de concentrer entre ses mains les leviers sécuritaires et militaires. Il a également qualifié les accusations de « complot » émises par la présidence à l’encontre de certains acteurs de « simples allégations dépourvues de preuves ».

Ces déclarations interviennent dans un contexte social et politique tendu, marqué par une crise économique aiguë, la montée du chômage et des mouvements de protestation, notamment dans le gouvernorat de Gabès. Pour de nombreux observateurs, cette vague de critiques traduit une inquiétude croissante au sein de milieux qui constituaient, jusqu’à récemment, un soutien essentiel au président, bien que l’impact concret de ces prises de position sur la scène politique demeure encore incertain.