Le 20 novembre 2025 l’Assemblée générale des Nations unies a adopté une résolution consacrée à la lutte contre la torture et les traitements cruels, inhumains ou dégradants, à la suite d’un vote en troisième commission. Le texte réaffirme clairement que l’interdiction de la torture est absolue et ne peut être limitée par aucun motif lié à la sécurité ou à l’état d’urgence. Cette décision ravive l’attention portée à l’Algérie, État partie à la Convention contre la torture depuis 1989 mais toujours confronté à de graves accusations de mauvais traitements et de recours abusif aux lois sécuritaires.

Depuis plusieurs années des organisations internationales et nationales documentent un schéma récurrent de répression visant manifestants, journalistes, syndicalistes et défenseurs des droits humains. Amnesty International décrit une campagne soutenue contre l’opposition, marquée par des arrestations, des procès et des peines d’emprisonnement liés au Hirak du 22 février ou à de simples critiques pacifiques du pouvoir. Le rapport américain sur les droits humains 2024 signale des cas de torture et de traitements humiliants attribués à des agents de l’État, ainsi que des détentions arbitraires et des conditions carcérales jugées préoccupantes. D’autres rapports adressés au Comité contre la torture font état de détentions secrètes et d’un usage des lois antiterroristes exposant les détenus à un risque élevé de mauvais traitements.

Des affaires récentes suivies par l’organisation SHOAA illustrent ces inquiétudes. Dix-neuf organisations ont demandé la libération immédiate du syndicaliste et défenseur des droits humains Ali Maamri, ainsi que l’annulation de sa peine de quinze ans, avec l’ouverture d’une enquête indépendante et efficace sur ses allégations de torture et de disparition forcée. Dans une autre affaire l’organisation a réclamé une enquête urgente concernant le traitement de Yacine Benshattah et Hadjer Zitouni, anciens responsables du Croissant-Rouge algérien, après des témoignages faisant état d’humiliations, de pressions psychologiques et de mauvais traitements dans une unité de la gendarmerie à Alger.

Ces cas ne constituent pas des incidents isolés. Des experts de l’ONU ont déjà exprimé leur inquiétude face à des accusations d’agressions sexuelles et de torture contre un manifestant du Hirak, ainsi qu’aux arrestations de militants qui l’avaient soutenu. Amnesty International a en outre appelé à mettre fin aux poursuites contre ceux qui ont révélé la torture d’un enfant en garde à vue, dont un témoignage évoquant une tentative de viol. Des mémorandums soumis au Conseil des droits de l’homme parlent de milliers d’arrestations liées à des protestations pacifiques et d’un climat où la dénonciation des abus peut mener à des représailles.

Sur le plan structurel l’Algérie n’a toujours pas adhéré au Protocole facultatif de la Convention contre la torture et ne dispose d’aucun mécanisme national de prévention capable d’effectuer des visites régulières et indépendantes dans les lieux de détention. Des défenseurs des droits humains estiment que l’allongement de la garde à vue dans les affaires de terrorisme, la restriction de l’accès aux avocats et l’absence de garanties médicales et judiciaires créent un environnement propice à la torture et nuisent à la documentation et à la responsabilisation.

Dans ce contexte la résolution adoptée le 20 novembre dépasse la simple valeur symbolique. Elle rappelle que l’Algérie a l’obligation de prévenir la torture en toutes circonstances, d’enquêter rapidement et de manière indépendante sur chaque allégation, de protéger victimes et témoins contre les représailles et de bannir tout aveu obtenu sous la torture des procédures judiciaires. Les dossiers de Ali Maamri, Yacine Benshattah et Hadjer Zitouni, comme d’autres affaires liées au Hirak, montrent que ces engagements doivent se traduire par des réformes concrètes, des mécanismes de contrôle indépendants et des voies de recours réelles pour les victimes.