Gabès, au sud de la Tunisie, s’est transformée mardi en une ville morte, paralysée par une grève générale totale visant à exiger le démantèlement d’un complexe industriel jugé hautement polluant par la population locale.

Des centaines de manifestants, parmi eux des avocats, des militants des droits humains et de simples citoyens, ont envahi les rues pour dénoncer la dégradation dramatique de l’environnement et l’inaction des autorités.

Depuis deux semaines, cette ville de près d’un demi-million d’habitants connaît une vague de protestations continues réclamant la fermeture du complexe chimique vétuste, accusé d’avoir provoqué plus de 200 cas d’asphyxie et d’empoisonnement, notamment parmi les enfants.

Le complexe, créé en 1972, utilise des substances chimiques pour produire des engrais à partir du phosphate. Les habitants et plusieurs experts l’accusent d’être à l’origine d’émissions toxiques répétées depuis début septembre, rendant l’air irrespirable dans toute la région.

Des vidéos d’élèves évanouis, secourus dans leurs écoles la semaine dernière, ont provoqué une vague d’indignation sans précédent. Des milliers d’habitants sont descendus dans les rues, dans un mouvement de protestation inédit depuis plusieurs années, selon des militants locaux.

Selon Sawsan Nwisser, membre du bureau local de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) :

« La grève générale est suivie à 100 %. La ville est totalement paralysée. Tout est fermé à Gabès. Nous sommes tous en colère face à la situation environnementale catastrophique de notre ville sinistrée et marginalisée. »

Elle a ajouté que ce mouvement de grève est une réponse directe aux promesses non tenues des autorités, accusées de ne rien faire pour sauver la ville.

La semaine dernière, les forces de l’ordre ont dispersé une manifestation massive en recourant à des tirs intenses de gaz lacrymogène, arrêtant plusieurs dizaines de personnes.

Le porte-parole de la Garde nationale, Houssem Eddine Jebabli, a déclaré que les forces de sécurité avaient agi « avec fermeté face aux agressions », précisant à la télévision nationale que des manifestants avaient lancé plus de 800 cocktails Molotov et commis des actes de pillage et de vol.

Alors que la crise écologique et sociale s’aggrave à Gabès, les habitants réclament des mesures urgentes pour protéger leur santé et leur environnement, accusant le gouvernement d’ignorer l’une des pires catastrophes environnementales que la Tunisie ait connues depuis des décennies.