Quand le poison de la division traverse les frontières..
Par Hichem ABOUD
Après s’être entre-déchirés durant plus d’une décennie dans une guerre civile sanglante ayant coûté la vie à quelque 250 000 personnes et fait des milliers de disparus, les Algériens, loin d’avoir tourné la page, semblent porter encore en eux les stigmates d’une haine tenace.
Une haine que le régime en place n’a jamais cessé d’alimenter, exploitant la division, la méfiance et la violence comme armes de gouvernance. Aujourd’hui, ce poison dépasse les frontières et vient contaminer les communautés de la diaspora.
Lundi 21 juillet, vers 22 heures, à Montpellier, un Algérien de 29 ans a poignardé un chauffeur de tramway, lui aussi Algérien, en pleine rue, sous les cris de « sale Arabe » et « vendu ». La victime, âgée de 42 ans, a reçu un coup de couteau au ventre. Heureusement, son pronostic vital n’est pas engagé.
Selon les informations du journal Midi Libre, le drame s’est produit alors que le conducteur de la TaM (Transports de l’agglomération de Montpellier) s’apprêtait à prendre son service aux côtés d’un collègue. C’est à ce moment qu’un individu s’est approché de lui et l’a violemment pris à partie. L’homme l’a copieusement insulté en français et en arabe, proférant à son encontre des menaces de mort. « Sale Arabe ! Vendu ! », aurait-il hurlé, avant de lancer : « Je vais te planter ! »
Tandis que la tension montait, plusieurs témoins ont crié le mot « mouss », terme d’argot signifiant « couteau » dans certains dialectes maghrébins. L’agresseur, visiblement déterminé, s’est alors rué sur sa victime, une arme blanche à la main, et l’a poignardée au niveau de l’abdomen. Malgré une tentative d’esquive, le conducteur n’a pu éviter la blessure. Il a été rapidement pris en charge par les secours et transporté à l’hôpital.
L’auteur présumé des faits a tenté de prendre la fuite, mais il a été rapidement interpellé par une patrouille de la brigade anticriminalité (BAC). Lors de son arrestation, les policiers ont découvert sur lui un couteau, qu’il aurait tenté de dissimuler. Déjà connu des services de police et de justice, il a été placé en détention provisoire dans l’attente de sa comparution immédiate devant le tribunal judiciaire.
Ce fait-divers glaçant n’est pas un cas isolé. À Paris, ces derniers mois, plusieurs rassemblements de soutien au régime algérien ont été organisés par des ressortissants algéro-français. Ces manifestations, loin d’être pacifiques, se sont souvent soldées par des affrontements verbaux et physiques avec des militants de l’opposition algérienne en exil. Des figures connues ont été ciblées, harcelées, parfois même agressées dans la rue. Les réseaux sociaux, eux, deviennent les arènes d’un autre genre, où se déchaînent les injures, les menaces et les appels à la haine.
Dans cette ambiance délétère, la fracture au sein de la diaspora algérienne ne cesse de s’élargir. Opposants et partisans du régime s’affrontent sur fond de blessures non refermées, de rancunes instrumentalisées et d’un climat d’intolérance savamment entretenu. Le régime algérien, lui, observe sans mot dire. Car il tire profit de cette division qu’il a patiemment cultivée : un peuple désuni est un peuple plus facile à contrôler.
La haine entre Algériens, qu’elle soit héritée des drames du passé ou nourrie par les manipulations d’un pouvoir aux abois, ne cesse de se propager. Aujourd’hui, elle menace la cohésion même des communautés expatriées, en France comme ailleurs. Elle jette un voile sombre sur l’espoir d’un avenir commun, apaisé, et tourne en dérision les aspirations à une Algérie réconciliée avec elle-même.
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