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La doctrine officielle adoptée par l’Algérie concernant le dossier du Sahara occidental affirme que cette question est un problème de décolonisation qui concerne uniquement le gouvernement marocain et le Front Polisario, et que l’Algérie n’est pas une partie directe dans ce conflit. Selon cette logique, la responsabilité incombe aux Nations Unies, qui doivent réunir les deux parties pour entamer des négociations directes visant à parvenir à une solution politique conforme au droit des peuples à l’autodétermination. C’est là la position officielle de l’Algérie, mais la réalité est différente.

Le Front Polisario a tenu plusieurs rounds de négociations avec les autorités marocaines. En 1989, le roi Hassan II a reçu à Marrakech les dirigeants du Polisario : Bachir Mustafa Sayed, Mahfoud Ali Beiba et Brahim Ghali, et leur a proposé un statut d’autonomie pour le Sahara sous souveraineté marocaine. Au milieu des années 1990, le prince héritier Mohammed VI a rencontré les dirigeants du mouvement à Tanger, Genève et plusieurs autres capitales, avec le soutien des États-Unis, de l’Espagne et de la France. Malgré l’optimisme apparent lors de ces rencontres, ces discussions n’ont abouti à aucun accord, le Polisario durcissant à nouveau sa position.

Beaucoup de Sahraouis, qu’ils soient sur les territoires sahraouis, dans les camps de Tindouf ou en diaspora, y compris des membres ou sympathisants du Polisario, s’interrogent sur les raisons de l’échec des négociations jusqu’à présent, et dans quelle mesure le Front dispose d’une autonomie complète pour prendre ses décisions de négociation. La majorité des membres du Polisario, quelle que soit leur appartenance, savent que la décision finale dans toutes les négociations revient à l’Algérie, et que tout blocage dans la conclusion d’un accord résulte du manque de volonté de l’Algérie.

Le régime algérien a investi des milliards de dollars pour soutenir « la cause sahraouie », en établissant et en gérant la structure politique et diplomatique du Polisario, en autorisant l’implantation des camps de réfugiés sur son territoire, et en formant une « armée de libération » équipée d’armes diverses. L’Algérie ne renoncera pas facilement à ces investissements, et n’acceptera aucune solution qui ne préserve pas ses intérêts.

Plusieurs dirigeants historiques du Polisario, tels que Bachir Mustafa Sayed, Omar Mansour, Ahmed Boukhari et Mayheb Salek, ont été harcelés et surveillés par les autorités algériennes en raison de leurs positions axées sur les intérêts du peuple sahraoui. L’Algérie a vivement opposé son veto à la candidature de Bachir Mustafa Sayed à la tête du Front après la mort de son premier leader Mohamed Abdelaziz en 2016, malgré le soutien d’une partie du congrès, et a empêché sa candidature en proposant à la place Brahim Ghali, alors ambassadeur du Polisario en Algérie. De nombreux anciens dirigeants tels qu’Omar Hadrami, Bachir Dkhili, Ibrahim Hakim et d’autres ont été contraints à l’exil, rejoignant le Maroc, la Mauritanie ou s’installant en Europe.

À ce jour, l’Algérie refuse de permettre au Front Polisario de prendre ses décisions de manière autonome concernant son avenir, en plaçant les intérêts du peuple sahraoui au premier plan dans le cadre de la paix et de la stabilité régionale. L’avenir des camps de réfugiés à Tifariti ou ailleurs n’a pas été décidé par eux, mais en Algérie. Le Maroc semble avoir pris conscience de cette réalité et exige l’ouverture de négociations quadripartites incluant le Polisario, la Mauritanie, l’Algérie et le Maroc, puis des négociations directes entre Rabat et Alger. Le roi Mohammed VI a invité à deux reprises le président algérien Abdelmadjid Tebboune à une rencontre directe pour mettre fin à l’impasse, mais ce dernier, influencé par l’armée, reste silencieux.

Par : Pedro Canales