Face aux développements récents dans la région, je ne peux, en tant que président du Forum maghrébin pour le dialogue, que faire part de ma profonde inquiétude et de mon indignation quant à la tournure dangereuse que prennent les décisions des autorités algériennes. Le dernier épisode en date est l’organisation, avec un soutien logistique complet et une couverture médiatique officielle, d’un colloque international à Alger, le 21 juillet dernier, par une entité appelée « Parti National Rifain » — un groupe prônant ouvertement la séparation de la région du Rif du Royaume du Maroc.
Cette conférence ne constitue ni un événement isolé ni une initiative fortuite. Elle s’inscrit dans la continuité d’une démarche tout aussi grave : l’autorisation donnée à ce groupe fictif d’ouvrir un bureau de représentation sur le sol algérien en mars 2024. Une telle orientation représente une dérive diplomatique inédite et risquée, menaçant la stabilité régionale et sapant en profondeur le rêve légitime, partagé depuis des décennies par nos peuples, de construire un Grand Maghreb uni, fort et intégré.
L’attitude de l’Algérie ne peut être perçue que comme un reniement flagrant du principe de responsabilité collective et une atteinte directe à l’esprit de compréhension mutuelle, qui – du moins en théorie – avait présidé à la création de l’Union du Maghreb Arabe. Nous assistons à une politique dangereusement glissante, instrumentalisant la carte séparatiste avec une charge hostile manifeste à l’encontre du Maroc, sans égard aux conséquences de désintégration interne et d’instabilité régionale qui pourraient en découler.
J’ai suivi de près certaines justifications tentant de présenter ce soutien comme une réponse aux démarches diplomatiques marocaines, notamment sur la question du Sahara. Je le dis clairement : on ne répond pas à la politique par la promotion de la division, ni par l’accueil de projets qui menacent l’unité des pays voisins. La véritable réponse politique se construit par un dialogue stratégique, un débat mature, et non par des manœuvres à courte vue qui déchirent le tissu maghrébin et transforment la proximité en hostilité permanente.
Ce qui se joue aujourd’hui est une véritable trahison de l’idéal maghrébin né du Traité de Marrakech de 1989, et réduit à néant l’idée même de coopération et d’intégration régionale. Comment parler de partenariat maghrébin alors qu’un État de la région héberge officiellement un mouvement séparatiste et lui accorde un soutien politique, logistique et médiatique ?
Par sens de la responsabilité historique et morale, j’adresse un appel sincère aux autorités algériennes, ainsi qu’aux élites politiques et civiles de toute la région : il est temps de mettre fin à cette dangereuse escalade. Écoutons la voix de la sagesse. Le Maghreb ne peut plus se permettre davantage de surenchères ou d’aventurisme. L’histoire ne pardonnera ni l’hésitation, ni l’irresponsabilité.
Nous devons soit répondre aux aspirations de nos peuples et raviver le rêve maghrébin enseveli par les calculs étroits, soit accepter de sombrer dans une réalité absurde et stérile, où nos énergies sont dilapidées et nos jeunesses privées d’avenir. Pour ma part, je renouvelle mon appel à la tenue urgente d’un dialogue maghrébin civil, sérieux et responsable, pour reconstruire la confiance et redonner à cet espace régional la stabilité, la dignité et l’unité qu’il mérite. Avant qu’il ne soit trop tard.
Président du Forum maghrébin pour le dialogue