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Analyse: Chengriha et Mediène coincés dans leur propre système

Par : Abderrahmane Fares 


Massad Boulos
, conseiller spécial du président américain Donald Trump pour l’Afrique et le Moyen-Orient, s’est rendu à Alger le 27 juillet 2025 dans le cadre d’une tournée maghrébine. Si la visite s’est déroulée dans un climat cordial, elle n’en a pas moins transmis un message clair et ferme au régime algérien : “saisissez votre dernière chance maintenant, ou il sera trop tard.”.

En effet, l’administration Trump a fixé une échéance claire concernant le dossier du Polisario : la fin de l’année 2025 marquera un tournant décisif, un point de non-retour historique. Les États-Unis ont d’ores et déjà annoncé que la question du Sahara Occidental devra être tranchée lors de l’Assemblée générale de l’ONU en septembre 2025. Le régime militaire algérien ne dispose plus que de deux mois pour éviter l’inéluctable : soit le Polisario accepte de déposer les armes (comme le PKK en Turquie), soit il sera officiellement désigné comme organisation terroriste (comme le Cartel de los Sole de Nicolas Maduro), dans les deux cas, le régime d’Alger se retrouvera à découvert face à son propre peuple, exposant au grand jour ses faillites diplomatiques, économiques et sécuritaires.

Au vu de cette ultimatum, le régime se trouve pris au piège d’une impasse juridique, militaire et narrative. Protégé par la loi de mobilisation générale et les révisions autoritaires du code de procédure pénale, le haut commandement militaire semble en apparence intouchable. Cependant, l’équation de Saïd Chengriha en 2025 est verrouillée sur tous les plans. Il doit: 1) maintenir un pouvoir absolu, 2) dissimuler un réseau de narco-trafic transnational qu’il dirigeait personnellement, 3) refuser toute forme de dialogue ou de détente avec le Maroc et 4) masquer l’effondrement et la défaite du Polisario.

Chengriha se retrouve pris dans un étau stratégique : il ne peut reculer sans provoquer l’effondrement du régime, ni avancer sans s’exposer, ni négocier sans révéler sa propre vulnérabilité. Toute ouverture vers le Maroc impliquerait la mise à nu de son système de narco-financement et la négation de la posture hostile qu’il incarne, menant inéluctablement à sa chute. À l’inverse, une escalade militaire serait tout aussi suicidaire, entraînant une confrontation directe avec les États-Unis. Reconnaître la fin du projet Polisario reviendrait à démanteler le mythe fondateur de l’armée algérienne, perçue comme le rempart des peuples opprimés face à l’impérialisme occidental. Quant à une réforme ou une pacification interne, elle est rendue impossible par les purges systématiques lancées par Chengriha contre toute forme d’opposition, réelle ou anticipée : plus de 60 généraux emprisonnés, des centaines d’officiers neutralisés (Ghriss, Akroum, Abdelkader Haddad, Ali Oulahdj, Lachkhem, Guermit Bounuira, Bennacer, etc.), des prisonniers d’opinion (Merzoug Touati, Abdelkwakil Blamm, Mohamed Tadjadit, Khaled Chouiter, Mohamed Amine Belghit, etc.), des otages à valeur diplomatique (Sansal, Gleizes), et les purgés de 2019 (Saïd Bouteflika, Ahmed Ouyahia, Sellal, Ali Haddad, Eulmi, Kouninef, Tahkout, etc.).

Saïd Chengriha et Mohamed Mediène : prisonniers du système qu’ils ont façonné

Face à la menace Américaine d’une normalisation forcée avec Rabat ou d’un affrontement diplomatique avec Washington, Chengriha sait qu’une publication de preuves sur ses activités criminelles entraînerait sa désignation internationale par l’administration Américaine de Donald Trump, le gel de ses avoirs, et un risque réel d’arrestation dans les juridictions occidentales où il détient son patrimoine, comme ce fut le cas pour Nicolás Maduro.

Que faire donc ? La seule manœuvre encore possible pour Saïd Chengriha est la fuite en avant. Une stratégie de recomposition autoritaire par crise fabriquée, et désignation d’un bouc émissaire. En orchestrant une crise institutionnelle, en sacrifiant le président civil (placé par les militaires en 2019) et son entourage direct, et en imposant un « recentrage national », il pourrait justifier une rupture silencieuse avec le Polisario sans jamais reconnaître la victoire du Maroc. Un état d’urgence serait décrété, imputé à des traîtres purgés et due à une “guerre économique” menée par l’entourage civil du président, Boualem Boualem, Kamel Sidi Saïd, Kamel Rezig, Amirouche Hamadache, Abdeltif Belkaim, notamment via leurs liens étroits avec la Turquie. Une mise en scène -qui repose malgré tout sur des faits réels- permettrait de maintenir l’image d’un régime militaire assiégé -en vérité agité et pathétiquement hystérique-, tout en ravivant les tensions sectaires et identitaires à caractère islamiste et kabyle.

Le régime militaire d’Alger, personnifié par la personne de Saïd Chengriha, et les réseaux formels et informels de son allié Mohamed Mediène sont devenus des verrous biologiques. Tant qu’ils détiennent le pouvoir et qu’ils influencent la prise de décision, l’Algérie ne peut ni se réformer, ni guérir, ni évoluer, ni survivre autrement que par la fuite en avant vers un suicide collectif. Le pays se dirige droit vers une crise profonde, délibérément provoquée par Chengriha, narco-trafiquant et terroriste en uniforme, et Mediène, criminel de guerre et architecte de l’État-DRS. Tous deux partagent avec Nicolás Maduro et beaucoup d’autres une structure de pouvoir fondée sur le narcotrafic, la répression militaire, la confiscation des institutions judiciaires, et l’entretien d’un récit révolutionnaire fictif pour masquer un régime voyou.

Le système mis en place par Mohamed Mediène et Saïd Chengriha est arrivé à saturation: incapable de se régénérer sans violence, ni de perdurer sans provoquer sa propre destruction. Son effondrement ne sera pas un accident de l’histoire, mais la continuité logique de sa nature criminelle et destructrice. Lentement, par pourrissement interne, il s’autodétruit.

On dit que l’histoire, même mensongère, est écrite par les vainqueurs ; mais lorsqu’elle est surjouée, falsifiée jusqu’à l’épuisement, elle finit toujours par s’écrouler sur elle-même. Le décompte final pour Saïd Chengriha et Mohamed Mediène a déjà commencé.

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